Avant que j’apprenne le décès de Michel le Yougo, la bonne humeur régnait à la Comète. Le patron avait décidé ne nous offrir une « assiette de tapenade » soit pour nous habituer à consommer soit pour s’excuser de ne pas profiter de la baisse de la TVA pour baisser les tarifs.
J’étais avec Djibril et Tonnegrande. Molière s’est pointé et s’est mis entre nous. Tonnégrande est sorti téléphoner.
Je vous ai probablement déjà présenté Molière. C’est un con. En plus, il s’appelle réellement Molière alors que, par exemple, « La Grosse à Jacques » n’est que le surnom de Jackie. Pour laisser Google tranquille, je ne vous dirais pas son prénom mais il ressemble étrangement au nom de famille d’un écrivain né en 1799. En l’an VII, plus exactement, le 1er plairial, mais on ne va pas chipoter.
C’est un ancien militaire qui a fait 30 ans de carrière avant de se trouver un prétexte pour prendre une retraite anticipée en touchant une confortable pension suite à de faux problèmes de santé. Il n’arrête pas de brailler dans les bistros. Personne ne peut le sentir mais, il n’est pas méchant, juste très con, on n’a aucune raison de le virer. Molière est Indien, ce qui vaut mieux que deux Tuloras, dirait Jacques. De Pondichéry, si ma mémoire est bonne.
Nicolas le Loufiat a amené l’assiette de tapenade, composée de 8 toasts de gros pain avec de la tapenade (ben ouais…), un filet d’anchois et des tomates confites. J’ai horreur des tomates, en principe, mais j’adore les confites. J’ai horreur des anchois mais j’adore la tapenade.
Je mange deux toasts. Djibril et Molière aussi. Je dis : « Putain ! Tonnegrande est sorti, il faut lui garder ses deux parts ».
Tonnegrande revient, mange un toast et je vois Molière prendre le deuxième, le presser pour jeter la tapenade dans le ramequin pour ne garder que le pain et le filet d’anchois. Il n’aurait pas du ! D’une part, c’est très grossier de prendre le dernier toast, surtout quand on s’était mis d’accord pour le garder pour un copain. D’autre part, c’est très grossier de recouvrir un bol de succulentes tomates confites de tapenade malaxée avec ses petits doigts. Surtout, c’est complètement con de supprimer la garniture d’une espèce de sandwich pour n’en manger que le pain. Je cherchais un prétexte pour me fâcher avec Molière. Il était tout trouvé.
Je l’engueule donc prodigieusement. Djibril, Nicolas et Tonnegrande me connaissant, ils savaient que je plaisantais. Pas Molière.
Je lui dis : « Putain de connard, Tonnegrande nous offre une assiette » (ce qui était faux) « tu pourrais au moins t’abstenir de prendre le dernier ». Molière commence à répondre piteusement : « mais je savais pas qu’il avait payé » (il ne pouvait pas savoir, c’était faux) « je vais en acheter une autre, ce n’est pas grave ». Moi : « si c’est grave, bordel, tu t’installes entre nous, tu piques notre bouffe en jetant une partie et tu penses t’en tirer par une pirouette ».
Molière commençait à trépigner. Djibril et Tonnegrande tentaient de calmer les choses alors que je ne voulais que me fâcher avec Molière pour virer un con. Nicolas le Loufiat rigolait comme un bossu mais commençait à avoir peur que le palpitant de Molière ne lâche. J’ai donc calmé le jeu tout en continuant à reprendre chaque prétexte de Molière, je ne voulais pas lâcher.
Ambiance au bar…
A un moment, Molière se lâche : « Et pour qui tu te prends ? L’assiette n’est pas toi mais à Tonnegrande, tu n’as pas à faire la morale, nanani nananère ». Moi : « L’assiette n’est pas à Tonnegrande, il nous l’a offerte, tu t’es installé entre nous pour piocher dedans, pour qui tu te prends toi-même, trou du cul ». Il n’aime pas quand je le traite de trou du cul. La dernière fois que j’avais fait ça, il s’était fâché aussi. Ca fait presque dix ans, on ne l’avait plus revu pendant deux…
C’est alors qu’il lance ce qu’il devait considérer comme une mise à mort. « De toute manière, je suis plus important que toi, je gagne 3000 euros, moi, jamais tu ne gagneras autant ».
Heu…
Mes trois autres camarades de jeu étaient pliés de rire. Nous sommes sortis. Molière s’est cassé pour tirer du pognon. Il a filé 10 euros à Tonnegrande qui a fini par les lui rendre pour qu’il commande une nouvelle assiette de tapenade. Puis il est parti fâché. Une autre andouille est arrivée. Nous avions marre de bouffer de la tapenade. Nous avons donc filé un toast à l’autre andouille qui a trouvé ça très bon. Elle a donc commandé une assiette pour lui mais s’est rappelé qu’il devait rentrer chez lui bouffer en famille. Il nous a donc refilé sa tapenade. J’en ai marre de la tapenade.
La soirée s’est poursuivie. Je suis allé faire les mots croisés à l’Amandine. Michel m’a prévenu du décès de Michel. Je suis revenu à la Comète. Le gros Loïc mangeait avec ses anciens patrons. A mon avis, il ne mangera pas avec les nouveaux.
Je suis resté rêver aux heures passées avec Michel. Molière s’est repointé vers 10 heures, visiblement surpris de me trouver là. Il a donné à Nicolas une pochette de papier alu contenant une préparation de sa femme, des espèces de beignets triangulaires, des samoussas, je crois.
Molière offre toujours de la bouffe à Nicolas le Loufiat quand il fait le con au bistro et doit se faire pardonner.
Nicolas avait déjà dîné. Dès que Molière est parti, il m’a refilé les samoussas. Ne le dites pas à Molière. On était pliés de rire. Merci Molière !
Tu vas être le premier sur Google avec "Molière" et "pirouette" associés !!!
RépondreSupprimerIl est un peu con mais visiblement pas méchant. Enfin… pour un militaire !!!
:-))
[Comment peux-tu ne pas aimer les tomates mais les aimer confites ! Tu m'étonneras toujours !!! :-) ].
Il est TRES con.
RépondreSupprimer[je confirme...]
On m'informe que l'information sur la mort de Michel est dans le Parisien de ce matin. Le gros Loïc est interviewé.
RépondreSupprimerSamoussa et tapenade ... sympa quand même ! :-)
RépondreSupprimer***BISES***
Ouais, c'est la Comète ! Toujours magique.
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