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12 mars 2011

Et si le poivrot se mentait à lui-même ?

Ayant définitivement arrêté de boire pour trois semaines depuis trois semaines et deux jours, il était juste que je me laisse aller hier soir. Les copains (de comptoir), eux-mêmes échaudés par les fois où une modeste prise de sang pour récupérer un permis ou faire plaisir à un toubib nécessite de se mettre au vert quelques mois, m'avaient prévenu : « Tu vas voir, les premières fois, quand tu vas t'y remettre, tu vas être saoul au bout de 4 ou 5 verres ! »

Hier soir, j'ai donc fait gaffe, mais comme je l'ai dit hier, un verre entraine le suivant. Etant rentré à la même heure que d'habitude, après avoir dépensé le même pognon que d'habitude (donc bu la même chose), dans le même état que d'habitude, j'ai ainsi constaté que cette maxime était totalement fausse !

Je me disais aussi : je ne voyais aucune raison d'avoir plus d'alcool dans le sang avec la même dose d'alcool mais que, peut-être, le manque d'habitude me verrait me comporter différemment. Alors j'ai réfléchi et je peux en tirer la conclusion suivante, même si j'ai déjà employé quatre fois le mot « habitude » en deux paragraphes.

Les pochetrons sont tellement habitués à être dans un état d'ébriété qu'il leur faut une cure de plusieurs jours sans alcool pour se rendre compte, le jour de la reprise, qu'ils sont saouls.

Vous pouvez prendre des notes, surtout si vous êtes étudiants en médecine : ce billet de blog est à haute valeur scientifique.

De fait, c'est un phénomène que je constate depuis très longtemps, près de 30 ans, peut-être, compte tenu de mon âge déjà avancé : il y a une manie chez les poivrots de nier leur propre état, voire de nier l'impact que l'alcool peut avoir sur le comportement.

Je me rappelle d'une conversation avec deux copains, anciens militaires, au comptoir de la Comète où justement, on parlait de ça... Pascal, en particulier, me disait qu'il lui fallait boire une bonne dizaine de bières avant de ressentir les effets de l'alcool alors que je disais moi que deux ou trois verres me suffisaient. Pourtant, ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas un débutant, côté bibine. Il se trouve que la première bière a un effet relaxant. Une ou deux de plus ont un effet « désinhibant ». On est très peu de clients de comptoir à le reconnaître (dans ma bande, par exemple, il n'y a que Djibril et moi). L'effet est presque inverse, chez moi, j'ai peur qu'on voit quand j'ai bu un peu... Un repas professionnel où l'on boit une bouteille à trois est presque un cauchemar, pour moi, avec la peur que les collègues remarquent, quand je rentre au bureau, que j'ai bu un peu.

J'abuse à peine ! En décembre, j'avais déjeuné au comptoir avec l'illustre Balmeyer, de fil en aiguille, j'avais bu quatre bières (pas lui, hein !) (sa femme me lit peut-être) et en rentrant au bureau, je faisais tellement d'effort pour paraître normal que les collègues avaient immédiatement soupçonné du louche !

Pourtant, au risque de me répéter, ceux qui me connaissent savent que quatre bières n'est pas de nature à me faire osciller. Une bête appréhension, quoi ! Mais je vais arrêter cet aparté sur mon cas personnel...

Ainsi, plusieurs soirs, pendant ces trois semaines, j'ai passé des soirées avec des gens qui buvaient à en être très chiant (ce n'est pas l'objet du billet, un écran ne suffirait pas) mais qui niaient avoir bu. Le plus drôle étant qu'ils le niaient également le lendemain. « Ah ! Mais qu'est-ce que tu étais chiant hier soir, tu étais plein comme une vache. » disais-je plusieurs fois à … non, pas de nom. « Ah ! Mais non, j'ai rien bu, juste 6 bières et 2 Ricard » me répondait-il... (le phénomène est accentué par la prise d'âge : en vieillissant, on supporte moins l'alcool, un poivrot de 60 ans qui a du mal à boire 5 bières est toujours nostalgique de ses 25 ans, quand il en buvait une trentaine certains soirs...)

Je vous passe tout ce que j'ai entendu en 25 ans ! « Ah ! Non, j'étais pas saoul, je suis même rentré en voiture sans problème, alors, hein ! »

Ou alors : « Ah, mais non j'étais pas saoul. » « Tu te rappelles que t'as cassé un verre ? » « mais c'est pas vrai, hein patron, je n'ai pas cassé de verre hier ? » « heu... »

Je pensais jusqu'alors qu'il s'agissait d'une espèce de fierté toute masculine. « Moi, je suis pas saoul, je tiens la marée ! »

Pendant ces trois semaines, avec confirmation hier soir et cette histoire de reprise de boisson après trois semaines qui ne m'a fait aucun effet, j'ai constaté que ce n'est pas ça (ou que partiellement). En fait, les pochetrons ne se rendent même pas compte qu'ils sont saouls, jusqu'à le nier le lendemain, … Incroyable, non ?

11 commentaires:

  1. Bravo beaucoup de lucidité dans ce billet

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  2. J'acquiesce, en lisant ce billet un verre á la main.

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  3. Ah ah, fais moi penser à commenter lundi !

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  4. Un grand billet...

    (je suis comme toi tiens. Quand je suis pas bourré je fais le con, après je me tais de peur qu'on me dise "tiens, t'es rond comme un boulon toi"... Dure vie qu'on a)

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  5. Moi je m'en fous, je suis chiant tout le temps…

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  6. Mais c'est exactement pour ça que je ne bois pas plus ! L'état désinhibé des 3 ou 4 premières bières est agréable. Au delà c'est une autre histoire !
    :-))

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  7. Comme tu dis bien les choses...

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  8. Bon, d’abord, ce qui est amusant est qu'on pourrait croire que les habitués de comptoir se moquent un peu d'être surpris ivres, quand tu parles de cauchemar, c'est surprenant, mais je ne peux que comprendre.

    Il m'est arrivé de vivre quelque scène bien burlesque dans cet esprit, après un repas arrosé : je me comportais comme un robot, avec tellement de précaution dans les gestes (un geste à la fois pour être plus précis), que ç'en était très suspect, et très comique !

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  9. Par contre, nier d'être saoul, ça me surprend. C'est sans doute pour éviter d'avouer d'être saoul "tout le temps".

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  10. Las gens,

    J'attendais la réaction de Balmeyer pour répondre.

    Stef, emanu124,

    Pourquoi parlez vous de lucidité ? Je ne veux pas dire que je ne bois pas mais je me situe dans les "10%" de la population qui évaluent très bien leur ivresse. Pour aller plus loin, comme je suis d'une part un roc et d'autre part un taiseux, la plupart des gens ne se rendent pas compte quand je suis saoul et c'est moi qui le leur fait remarquer...

    Jeffanne,

    J'essaie.

    Margazux,

    Santé !

    FalconHill,

    Si tu fais le con quand tu n'es pas bourré, tu n'as pas besoin de boire.

    Poireau,

    Oui. Mais le pochetron ne sait pas se limiter à ces 3 ou 4 bières.

    Didier,

    Le coté "chiant" des gens bourrés fera l'objet d'un autre billet, un jour...

    Balmeyer,

    Je ne sais pas pourquoi ils nient, je crois surtout que c'est un état normal, chez beaucoup, cette semi cuite qu'on peut avoir une huitaine de bières... Du coup, ils estiment ne pas être bourrés...

    "ce qui est amusant est qu'on pourrait croire que les habitués de comptoir se moquent un peu d'être surpris ivres" Bof. Au contraire, s'ils étaient vus ivres, ça serait reconnaitre qu'ils boivent trop et donc qu'ils sont ivrognes...

    Ce que je trouve très drôle, c'est quand je n'ai bu qu'un peu et qu'on me regarde c'est que je fais un tas d'efforts pour marcher droit, qu'en fait je titube...

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