Les camarades de 3minutes30 profitent de la sortie du
Beaujolais nouveau pour nous vanter les bouteilles de vin en plastique. C’est un sujet éminemment sérieux qu’il
convient de traiter avec une extrême rigueur.
Tout d’abord, constatons que le vin est souvent associé au
pain. Le plastic est vendu en pain.
Plus sérieusement, il s’agit du PET (polyéthylène téréphtalate)
ou plastique soufflé. Je n’ai pas vraiment de compétences en écologie (il
faudrait consulter des blogueurs spécialisés comme Nicolas et Eric) et, du côté des machins qui se
boivent, j’ai plutôt des compétences dans d’autres liquides. Toujours est-il qu’il
parait que le bilan écologique des bouteilles en PET est bon, du moins c’est ce
que nous dit cet admirable webmagazine qu’est 3minutes30. Bref, le PET n’est
pas foireux.
Pour résumer, le PET est beaucoup plus léger que le verre (le
bilan énergétique du transport et des manipulations par les professionnels est
excellent) et est un matériau entièrement recyclable (par contre, je n’ai pas
la capacité à comparer son bilan, au niveau de la production, avec le verre).
« Les consommateurs en
France privilégient les bouteilles de vin en verre, cependant les Bag In Box ne
cessent de gagner du terrain dans le linéaire des grandes surfaces. Le lait, ou
l'eau, autrefois toujours consommé en bouteille en verre, se vendent désormais
en briques ou en bouteille plastique. Alors pouvons-nous nous attendre à la
disparition des bouteilles de vin en verre ? »
Les blogueurs marketing utilisent des termes spéciaux. Les « Bag
In Box » sont des cubis de pinard (des « sacs en boite »). Je
suppose que le « linéaire » correspond aux rayons ou étalages des
supermarchés.
Il s’agit maintenant de répondre à la question de 3minutes30 :
« Alors pouvons-nous nous attendre à la
disparition des bouteilles de vin en verre ? » La réponse est
évidemment négative, pour une question d’image de marque du pinard, ce qui n’empêchera
pas le PET de se répandre et à la part du verre de diminuer.
Je pose une question intermédiaire : quel est l’impact
du PET sur la conservation du vin ? Par exemple, il m’arrive d’acheter du
vin (plus pour chez ma mère que pour chez moi, mais ça revient au même : c’est
moi qui le boit…) sans avoir la moindre idée du temps qu’il passera en cave. Si
je n’ai pas l’assurance qu’un petit vin en PET peut se conserver cinq à dix ans
dans une cave, je n’achèterai pas de bouteille en PET.
Par contre, pour une consommation « quotidienne »,
le consommateur sera gagnant : le vin sera moins cher et les bouteilles
moins difficiles à transporter. Celui qui a déjà eu à descendre trois caisses
de vin (environ 7 kilos par caisse) dans un petit escalier en ciment mal
éclairé descendant dans une cave comprendra facilement ce que je veux dire…
Le PET explosera donc. Je suppose, par contre, que ça
dépendra des différents types de vin, des origines, … Je vois difficilement un
vieux Bordeaux ou un vieux Bourgogne se vendre dans des bouteilles en
plastique. Le PET n’est pas à égalité devant une carte de France ou devant l’âge.
Le Français a un comportement con avec le vin et avec le
fromage.
Mais le fromage n’est pas le sujet du billet. On ne va pas
faire un fromage en PET.
Moi-même, je gueulais quand les bouchons en plastique ont
commencé à remplacer les bouchons en liège. Pourtant, force est de reconnaître
qu’une bouteille avec bouchon en plastique n’est jamais bouchonnée. On trouve
beaucoup d’avis sur Internet que j’utilise parce que c’est la seule source d’information
à ma disposition. Il est difficile de se faire un avis objectif, voire
scientifique, puisque qu’on ne peut pas mesurer le degré d’objectivité des avis
déposés sur la toile. Un producteur de liège trouvera des milliers d’arguments
pour démontrer que le liège est meilleur.
Pourtant, une rapide lecture montre qu’il n’y a rien de pire
que le bouchon en liège, uniquement issu d’une longue tradition française. Le
bilan écologique est mauvais (il faut des 4x4 pour aller en foret et de la
colle pour colmater les fissures dans les bouchons). En lisant Internet, on va
donc en déduire que le plastique est mieux que le liège pour les bouteilles de
pinard. On va même en déduire que les capsules à vis sont meilleurs.
Et à part mon amour propre de Français défenseur de nos
produits du terroir, je n’ai aucune raison de penser que ça ne puisse pas être
vrai. Quand je pense que je bouffais avec des réacs, hier midi…
Ainsi, je n’ai aucune raison de penser que le vin pourrait être
moins bon dans du plastique que dans du verre mais j’aurais toujours une
réticence idiote à acheter du vin dans une bouteille en plastique.
Pourtant, les cubis de pinard progressent. Il s’agit bien de
pinard conservé dans du plastique avec un emballage en carton nécessaire pour
rigidifier le tout, la
flexibilité ayant des limites.
Les bouteilles d’un litre de vin et les cubis ont une
mauvaise réputation historique, comme tous les « petits vins » parce
qu’ils représentaient une mauvaise qualité. Or, les producteurs ont bien
progressé et il y a de moins en moins en moins de « mauvais vins ».
Les « petits vins » sont souvent savoureux, maintenant, et ce n’est
pas mon copain FalconHill
qui me dira le contraire ni même cette vieille poche de Yann Savidan.
Ainsi, le rapport « qualité prix » du vin a
fortement progressé en vingt ou trente ans. Le prix a augmenté, probablement,
mais la qualité beaucoup plus. Néanmoins, pour vendre leurs produits, les
producteurs ont été obligés d’utiliser des « emballages »
significatifs de qualité (des bouteilles de 75 cl… avec des belles étiquettes)
ce qui a entraîné un autre surcoût. Les esprits sont-ils murs pour reprendre
des emballages qui ont été caractéristiques, à tort, de mauvaise qualité du vin ?
C’est la deuxième question à se poser après celle de la
capacité du PET à être garant de la qualité. La troisième question, toujours
autour des « esprits », est de savoir si les « nouvelles
générations » pourront s’affranchir du rapport ridicule qu’ont les
français avec le pinard, ce que je vais illustrer avec deux ou trois anecdotes
de bistro (sachant que j’ai déjà raconté la deuxième, je la raconte d’ailleurs
peut-être à chaque Beaujolais nouveau…).
Première anecdote
Il y a quelques années, avec des copains de bistro, nous
avons aidé l’un des nôtre à déménager l’appartement de sa future épouse et le
sien dans leur nouvel appartement en commun. Deux déménagements en un. Le soir,
la future mariée nous avait préparé un bon repas mais elle avait laissé le vin
rouge à température ambiante. Il faisait vingt-cinq degrés.
J’avais donc réclamé des glaçons pour pouvoir le boire (on
avait été en chercher dans un bistro pour l’apéro). J’étais passé pour un fou.
C’était une hérésie de boire du vin rouge avec des glaçons.
Je n’avais pas réussi à leur faire comprendre que c’était
encore plus hérétique de boire du vin rouge à 25 degrés.
Notons que ce sont exactement les mêmes qui vont demander
une « Côtes-du-rhône » fraiche quand ils sont à un comptoir. Ils vont
préférer celle à 12 degrés qui vient du frigo par rapport à celle posée sur le
comptoir, remontée dans la journée de la cave et donc à une température
légèrement inférieure à celle de la pièce…
Deuxième anecdote
C’était à l’occasion du Beaujolais nouveau, vers 2005 ou
2006. Le gros Loïc avait décidé que nous passerions une partie de la soirée à
comparer les différents Beaujolais à notre disposition. Nous avions celui en
bouteilles, à la Comète, celui en fût de bois, à la Comète et une bouteille de « Duboeuf »
achetée par le gros. Il avait été cherché un pichet de vin du fût de l’Aéro, en
face.
Il avait établi une hiérarchie dans sa tête : le plus
mauvais devait être celui de l’Aéro (le bar étant tenu par un Arabe), ensuite
celui en bouteille de la Comète (destiné à ces crétins de cadres qui ni
connaissent rien et viennent une fois par an à la Comète pour boire du
Beaujolais en mangeant) et celui en fût de la Comète. Le Duboeuf devant être le
meilleur.
Vous m’avez suivi ?
Ainsi, nous avons réussi à jouer son jeu pour les trois
premiers et à être d’accord avec lui. Or, Jean et moi savions que le vin des
trois premières sources était le même. La Comète et l’Aéro avaient le même
fournisseur. L’Aéro avait rempli son fût en bois avec les bouteilles… A la
Comète, c’était un faux fût en bois. Le vin était dans une poche en plastique
spéciale à l’intérieure, directement connectée au robinet du fût… Le patron,
Jean, m’avait fait goûter le vin, la veille au soir, quand il mettait ses
machins en place. Il a remonté le fût de la cave et une bouteille en même temps :
les pinards étaient exactement les mêmes.
Pendant que le gros Loïc est allé chercher le pichet à l’Aéro,
j’avais eu une idée… Jean a ainsi transvasé le Beaujolais du gros Loïc dans une
bouteille vide de son Beaujolais à lui et mis dans la bouteille de Duboeuf du
rouge ordinaire, celui que je qualifie de « mauvais vin », ci-dessus,
le machin dont on ne voudrait même plus pour préparer un Bourguignon.
Quand le gros Loïc est revenu, Jean lui a montré la
bouteille ouverte et lui a dit : « Tiens,
j’ai ouvert ta bouteille pour que le vin respire, je vais la mettre au frais. »
Le gros avait acquiescé et nous avons donc pu comparer nos trois vins
identiques et établir une hiérarchie entre eux.
Ensuite, le moment de la dégustation du Duboeuf arrive. Jean
me sert un verre et je joue à celui qui déguste, je fais tourner en bouche et
je dis « Ah ! Oui, c’est quand même autre
chose. » Tout le monde joue le jeu en sachant que c’était du rouge
ordinaire (à 8° de température). Le gros est content et dit pareil. Je dis « Jean ! Remets-moi un verre du tien que je puisse
comparer. » Il sort donc la bouteille de son vin qui contenait le
Duboeuf du gros Loïc (à une température normale). Il met un deuxième verre à
chacun pour permettre à tout le monde de comparer. Tout le monde à jouer le
jeu, le gros Loïc était aux anges.
Son vin était le meilleur. Il avait ainsi montré que le
rapport qu’il avait avec la qualité du vin était purement affectif en montrant
qu’un rouge ordinaire à 8° pouvait être meilleur qu’un Beaujolais nouveau « de
qualité supérieure à température ambiante » !
Un des nôtres est alors descendu aux toilettes.
Discrètement, j’ai inversé ses deux verres. Pour faire mousser le gros, on a
continué notre petit jeu qui consistait à goûter alternativement un vin et l’autre.
Celui qui est remonté des toilettes et qui avait joué le jeu avec nous avant
nous n’avait pas vu que j’avais inversé les deux verres. Il continuait à dire
que le Duboeuf qui n’en était pas était meilleur que l’autre alors que c’était
réellement du Duboeuf qu’il buvait.
Vous qui me lisez, là, vous vous direz : « Ah ! Les cons ! Ce n’est pas à moi qu’on la ferait. »
Ben détrompe-toi. Le Beaujolais nouveau n’est pas un vin très bon (mais pas
mauvais contrairement à ce que disent les peine-à-jouir évoqué par Yann dans son
billet), on le boit donc frais et tous les arômes disparaissent à part ce
fameux goût de Beaujolais nouveau qui ressemble à de la banane une année et à
de la cerise la suivante selon ce que les industriels du Beaujolais ont décidé.
Ainsi, la plupart des Français ont des idées complètement
préconçues à propos du vin et seul un vrai connaisseur peut apprécier certaines
subtilités. Mais chaque Français se croit un spécialiste.
Ainsi, le PET n’est pas près de faire tache d’huile.
*** Coucou Nico !
RépondreSupprimerEn Asie on est loin d'avoir du Beaujolais Nouveau sur notre table ! ;o)
Bon... de toute façon je ne suis pas connaisseuse en matière de vin et d'alcools en général donc ... "qui ne sait pas se tait" ! ;o)
Bises et bonne journée ! :o) ***
Il faut que tes enfants qui vieńent à Noël (j'ai lu ton billet dans le métro avec l'iPhone mais j'ai eu la flemme de commenter avec ce truc) t'amenent du vin !
SupprimerUne vieille lune: j'en parlais il y a quelques années, ici:
RépondreSupprimerhttp://fattorius.over-blog.com/article-34614762.html
A noter que s'il y a un secteur qui a adopté le PET, c'est bien l'aviation, pour des raisons de poids. Perso, je crains toujours que le goût du plastique n'altère, à terme, celui du vin.
Oui, bon billet... Qui pose la bonne question, dans la phrase de la fin : y'a-t-il un oenologue pour donner son avis ?
SupprimerTu en poses une autre : la durée possible de conservation dans du plastique. Le vin s'altère-t-il ?
Nous ne disposons pas encore du recul nécessaire pour répondre...
SupprimerA noter quand même, comme base de réflexion, que des bouteilles de cognac de la fin du dix-huitième siècle (verre, donc, avec un contenu buvable) ont été vendues récemment aux enchères; le PET ne résistera sans doute jamais à l'outrage des siècles! Quelle est d'ailleurs sa durée de vie, en général? Y a-t-il un ingénieur spécialisé dans les emballages alimentaires dans la salle?
(purée, ça commence à faire du monde...)
Non, nous n'avons pas le recul. Le verre ne disparaitra pas, notamment pour les vins haut de gamme et pour la restauration (encore que, la vente au verre se développe beaucoup). Et je ne te parle pas des produits pour collectionneurs (un cognac de plus de 100 ans est-il bon, sert-il à quelque chose, sachant qu'un cognac est un assemblage de production de plusieurs années) ! C'est plus un phénomène de prestige qu'autre chose...
SupprimerCe qui nous intéresse, ce sont les vins qui se boivent dans les trois ans et je suppose qu'on a déjà le recul (mais comme je dis dans le billet, un vin de trois ans peut rester en cave pendant dix ans). Ce sont justement ceux que j'aime bien, à la maison (mais j'en bois très peu, je bois surtout de la bière au bistro et du vin chez ma mère).
On est jamais assez nombreux pour parler de pinard.
"Ce qui nous intéresse, ce sont les vins qui se boivent dans les trois ans et je suppose qu'on a déjà le recul (mais comme je dis dans le billet, un vin de trois ans peut rester en cave pendant dix ans). "
SupprimerJuste - et ne pas devenir forcément imbuvables. Ce serait quand même ballot que le liquide soit altéré parce que le contenant ne supporte pas le vieillissement...
"On est jamais assez nombreux pour parler de pinard."
Vrai. Il faut donc prévoir plus de pinard.
N'oublions pas que ma spécialité, c'est la bière.
SupprimerPour l'altération, on verra. Mais je suis disposé à payer 50 centimes de moins sur une bouteille à 6 euros... même si elle pourrait être perdue en quelques temps.
(je dis 6 euros au hasard, comme je le dis dans le mail, j'achète très peu de pinard et en ignore complètement le prix).
Je préfère mon BIB de Côte de Rhône ou de Lirac, que je laisse dans mon frigo et qui est miam
RépondreSupprimerPutain ! Jusqu'à l'instant, je croyais que "bib" était le diminutif de biberon alors alors que c'est l'acronyme pour Bag In Box...
SupprimerPour ma part, j'achète mon vin au litre, dans une bouteille en verre consignée, tiré au tonneau ...
RépondreSupprimerJ'achète ma viande chez le boucher, mes fruits et légumes sur le marché, souvent à 6h30, avant d'aller au taf ... C'est vrai que je n'aurais pas pu le faire quand j'avais les bébés ... Mais il serait faux de dire que je dépense plus : bien au contraire !!!
Je pense que beaucoup d'entre nous pourraient se ressaisir et agir ainsi pour faire obstacle aux destructions collatérales de la grande distribution : les packs de vin et de lait (avec une menbrane en alu !!!) en sont une ...
Bz
Un peu compliqué !
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