Suite à mon billet d'hier, Pierre notait ma nostalgie. Il
n'y en avait pas, dans ce billet. Je voulais d'écrire mes sentiments en
découvrant des bistros qui allaient devenir mes fiefs, ce sur je ne pouvais pas
savoir et je me suis retrouvé à parler de tout autre chose. La routine du
bistro entraîne la lassitude. Il arrive un moment où l’on n’a plus rien à se
dire, où l’on reste à rechercher des bonnes soirées qu’on a connues. C’est à ce
moment qu’on est mélancoliques. Il faut savoir tourner la page. Ainsi, dans mon
billet d’hier, je voulais décrire les changements…
Je ne peux pas être nostalgique : il y a toujours eu un
moment où j’ai fini par détester chacun des clients que j’ai connus longtemps même
si l’affection reprend toujours le dessus. La chanson dit : « les histoires d’amour finissent mal, en général ».
C’est pareil pour les histoires de bistro. J’étais tout le temps fourré avec le
vieux Jacques mais nous nous engueulions très souvent. Je ne pouvais plus le
supporter. Je le retrouve maintenant environ trois ou quatre fois par mois,
avec beaucoup de plaisir. C’est très bien ainsi.
La nostalgie est le regret d’un temps passé. Comment
pourrais-je être nostalgique d’une routine, d’un quotidien, avec des gens dont je
me suis toujours demandé ce que je foutais avec et que j’ai fini par fuir plus
ou moins… ? Comment pourrais-je être nostalgique de quelque chose que je
continue à pratiquer ?
Hier soir, j'arrive à la Comète. Le vieux Marcel m'attendait
devant. "Ah ! Je t'attends !" me
dit-il. "Ben pourquoi tu n'es pas rentré boire
un verre plutôt que de rester au froid ?" lui demande-je. "Ben je ne savais pas si tu allais venir." Quand
on connait Marcel, la scène prend toute sa démission. Il préférait attendre
devant le bistro au froid plutôt que de rentrer, d'avoir à discuter avec le
serveur parce qu'il ne savait pas si j'allais venir. Il n'y a que lui à pouvoir
raisonner ainsi… Je viens tous les soirs. Si j’avais prévu de ne pas venir, le
serveur aurait été courant et le lui aurait dit. Et comme il n’aurait pas voulu
être venu pour rien, de toute manière, il aurait pris un verre.
Il voulait me voir parce qu’on lui avait piqué son téléphone
et qu’il en avait un neuf. Il fallait que je lui rentre les numéros dedans. Depuis
que je le connais, c’est au moins la quatrième fois qu’il me fait le coup… J’ai
donc rentré quatre numéros, les quatre mêmes à chaque fois : celui de deux
potes à lui, celui du vieux Jacques et le mien. Pour les autres, notamment
celui de sa femme, il préfère taper le numéro.
Comme j’avais fait mon billet de blog dans la journée, je
lui ai demandé quelques précisions. En fait, je l’ai connu bien avant le vieux
Jacques. Je me demandais qui avait présenté « qui à qui ». Il a
rencontré le vieux Jacques à la Comète car ils y mangeaient avec leurs grosses
respectives tous les dimanches. On s’est rappelé quelques souvenirs. Il n’y
avait pas de nostalgie. La vie continue pour Marcel. Depuis, il a pris sa
retraite. Il traine à Bicêtre dans la journée et ne va plus au bistro le soir
sauf quand il a besoin de me voir. Généralement, il m’appelle avant. Là, il n’avait
plus mon numéro.
Christian et Ramdane sont arrivés. Je suis parti à l’Amandine
parce que je voulais voir Michel. Il y avait plein de monde au comptoir. Je ne
suis donc pas resté et j’étais de retour à la Comète vers 20h15. Mes compères
étaient toujours là. Marcel s’est barré. Le vieux Joël est arrivé et on a
continué à raconter des bêtises jusqu’à la fermeture, comme souvent, depuis 17
ans, dans des conditions idéales : deux ou trois potes calmes…
Si je voulais voir Michel, c’était aussi dans la suite de
mon billet. Il m’avait raconté une anecdote, ce week-end. Je l’ai racontée hier :
« Quand la bande fréquentait l'Aéro, pas ma
bande, celle de Jacky que je rejoignais le samedi soir, ils envoyaient le vieux
Joël en éclaireur, pour éviter que l'Amandine n'ait plus de client et ferme
tôt. » Je voulais des précisions. C’est tous les soirs qu’ils
faisaient leur manège, ce qui faisait beaucoup rire Michel. Mais il avait
oublié que je ne venais que le samedi.
De la nostalgie ?
Il y a une chose dont je n’ai pas parlé hier, c’est le
quotidien. J’arrivais à la Comète vers 19h30. Avec les copains, on se mettait dans
un coin du comptoir, près de l’entrée de la cuisine, où l’on ne peut plus se mettre
à cause de la caisse enregistreuse. Souvent les copains étaient déjà là avant,
depuis 17h30 ou 18h et commençaient à chauffer un peu.
On discutait alors à trois ou quatre (par exemple
Tonnégrande, le vieux Jacques, Jean et moi), parfois moins, parfois plus
(Djibril, Ramdane, le vieux Joël, …). Plus tard, on était rejoints par « la
bande des Monts d’Aubrac » qui se mettait un peu plus loin. D’autres
bandes étaient au comptoir. Celle des Indiens de Molière, notamment.
A 20h30, le patron fermait les portes à clés pour empêcher
certains abrutis de rentrer. La Comète n’était pas comme aujourd’hui. A la
place des terrasses couvertes, il y avait une véranda. Le loufiat (Josiane ou David
puis Jim) commençait le ménage « activement ». Le patron devait alors
s’occuper aussi des autres clients mais continuait à papoter avec nous. Il y
avait une sorte de jonction des bandes, dans laquelle étaient entrainés les
clients de passage. Le parking devant la Comète ayant été supprimé, il n’y a
plus de client de passage tardif.
Le serveur partait quand il avait fini le ménage, souvent un
peu avant 21h. Il n’y avait plus de client en salle. Tout le monde était au
comptoir même si, souvent, nous n’étions que trois ou quatre. Le patron fermait
les portes et nous restions discuter, s’il avait le temps. S’il y avait
beaucoup de clients, on restait au maximum jusqu’à 22 heures, sauf à une époque
où il était plus près de 22h30.
Si je suis nostalgique de quelque chose, c’est uniquement de
ces moments avec le patron et d’autres copains, changeant selon les années. 1h30
ou 2h de discussion. Je n’ai pas souvent retrouvé cette ambiance.
Les ingrédients sont difficiles à trouver et j’en ferai un
billet.
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