Raymond « était » un ivrogne britannique qui
donnait des cours d’anglais à des jeunes Chinoises dans la salle du fond, à la
Comète, tous les mardis soirs. A la fin de ses cours, vers 20 heures, il nous
rejoignait au comptoir. On le voyait parfois d’autres jours.
Si j’avais eu mon blog à cette époque, il en aurait été un des
personnages centraux. Il m’était presque sorti du crâne mais j’y pensais
parfois, me demandant ce qu’il était devenu. En fait, il avait cessé ses cours,
faute d’étudiantes, puis arrêté progressivement de venir à la Comète. Je
suppose qu’il n’avait pas de pognon. Sur la fin, on le voyait un peu errer dans
le quartier mais semblant se cacher. Je le croisais sur la place piétonne entre
chez moi et la Comète ou dans le métro mais jamais au bistro ou dans la rue.
Comme le patron de la Comète ne le voyait jamais passer, je suppose qu’il
dormait dans un des recoins de cette place et prenait la station de métro plus
loin, comme s’il se cachait de nous.
Hier, il est rentré dans le bistro, comme si on s’était vus
la veille, ne se rendant même pas compte de la surprise qu’il pouvait me
provoquer. Je l’ai pris dans mes bras car j’étais réellement heureux de le
voir. C’était bizarre : je ne suis pas coutumier de ces gestes d’affection.
C’est toute une partie de ma vie qui m’est revenue en mémoire, cette période d’avant
2002 ou 2003 (l’époque où j’ai connu Tonnégrande, le vieux Jacques et où Jim
est arrivé à la Comète).
Pourtant, il faut être honnête. Je ne pouvais pas le
blairer. Plus exactement, je l’aimais bien mais je n’aimais pas les moments
passés avec lui. Son accent anglais était horripilant et bien que vivant en France,
il se revendiquait différent. Ou, plutôt, il s’étonnait toujours des habitudes
que l’on pouvait avoir, comme si on devait s’adapter à ses propres coutumes. Dès
qu’on disait un truc, il répondait avec des phrases du genre : « ah
vous les Français… » La photo d’hier était mauvaise mais Raymond avait un
pif énorme. C’était une espèce de caricature d’ivrogne puant. D’ailleurs, par
moment, il puait réellement.
Je disais qu’à la fin, je soupçonnais qu’il était SDF mais
dans la première partie de notre copinage de comptoir, il habitait dans Paris,
je ne sais plus où. Je pense qu’il squattait chez quelqu’un mais qu’il ne
pouvait pas y aller toutes les nuits. Il dormait donc quelque part ailleurs… où
il n’avait pas les moyens de se laver. Je crois d’ailleurs me rappeler qu’il
faisait parfois sa toilette, le matin, à la Comète…
Pourtant, il était un peu comme une mascotte. Il nous
rejoignait alors que le bar était fermé et que nous connaissions ses moments d’intimité,
si particulier, que j’essaie de décrire parfois ici. Les clients de la salle sont
partis. Le patron est détendu et n’a plus qu’à attendre le moment où le serveur
a fini le ménage puis à décider quand il va virer les andouilles au comptoir.
Tu es un indécrottable sentimental, mon Nico !
RépondreSupprimer(et malgré la photo un peu flou (tu avais bu ?), on voit bien qu'il a un tarin surdimensionné)
Pas du tout (et je rate toujours les photos).
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