Vers 15 heures, je suis allé boire un
café au 1880, où j'ai passé la soirée, hier soir, spécial
Halloween. Ils avaient décoré le bar, quelques citrouilles
creusées, des fausses toiles d'araignées un peu partout, un
squelettes... L'ancien patron, le père de l'actuel, s'installe à
côté de moi. Nous papotons, notamment à propos des manifestations
de Quimper. La serveuses vient discuter avec nous. Le vieux lui dit
« mais dis donc, il n'y avait pas plus de
décorations, hier ? » « Si,
mais ils ont tout arraché... »
Je dis : « ouais,
c'était lourd. Je suis même parti avant la fin, il y avait trop de
bruit, trop de bordel, trop de monde. Pourtant tu me connais, en
principe, rien ne me fait bouger de mon comptoir. » La
serveuse confirme : l'ambiance était bizarre, des clients pas
habitués,... Elle n'était pas à l'aise non plus.
Généralement, le vendredi soir, quand
je suis à Loudéac, je passe une grande partie de la soirée tout
seul. Les copains arrivent généralement vers 23 heures, à la
fermeture du Cornouailles. Alors je suis au comptoir, avec mon iPhone
avec Twitter. Les clients sont jeunes, la vingtaine, et s'agitent
autour de moi sans que je ne les regarde. Les soirées du samedi sont
plus agitées...
Hier, au moment où je suis parti, je
pense qu'il y avait plus de 100 ou 120 clients. Un vrai bordel dans
le bar. Ca arrive parfois mais l'ambiance était oppressante. Ils ont
commencé à arraché la décoration, si bien que morceaux de toile
d'araignées pendaient un peu partout, il y avait vraiment beaucoup
de bruit... Et deux types m'avaient cassé les burnes, deux anciens
ou vieux copains.
Le premier, Yann, vers 22 heures. Il
vient me voir : « Hips, Nicolas,
Burp, tu habites toujours à Paris ? Il faudra – burp – que
tu viennes me voir à Châtelet, on ira boire un coup dans un bistro
que je connais, hic ! » « heu » « mais
si, ne me dis pas que tu ne sors jamais. » « Si,
mais je ne vais pas me faire chier aux Halles pour voir un type que
je rencontre tous les deux mois à Loudéac... ». La
négociation dure cinq minutes. On a convenu qu'il m'appellerait
quand il serait disponible. Je suppose qu'il va oublier. De toute
manière, il n'a pas mon numéro.
Celui-là, je le connais depuis environ
30 ans. J'avais 16 ou 17 ans et lui 3 ou 4 de moins. Je m'occupais du
club informatique et il venait jouer avec les PC. Il n'avait pas
l'âge mais nous n'avions aucune raison de l'empêcher de venir,
d'autant qu'il était, et est toujours, bien sympathique. Je crois me
rappeler que le fréquentais aussi à la piscine ou dans un autre
truc de sport (mais compte tenu du nombre de sports que j'ai
pratiqués, je ne vois pas où ça pourrait être autrement qu'à la
piscine).
L'autre, c'est Olivier. Lui, ça fait
moins longtemps que je le connais, peut-être vingt ans. Sa femme
était une vieille copine et ils traînaient parfois avec nous au bar
de la Grenouille qui a fermé il y a douze ans. Je l'ai peut-être vu
deux ou trois fois depuis. Il rentre dans le bar, à moitié saoul,
vers 23 heures, et vient me voir. « Salut,
comment ça va. Et au fait, Gilles, il n'est pas là, Gilles? » « ben
non, il ne sort pas le vendredi, tu pourras le voir demain. »
« Ah, et les autres, comment ils vont ? »
« Quels autres ? » « Ben heu, les autres,
il y avait qui déjà ? » « Ah,
et tu t'y intéresses un soir de cuite en débarquant par hasard ? »
Je replonge dans mon iPhone. Ce type est sympa mais l'ayant perdu de
vue, toute sympathie était partie. Comme il était bourré,...
Il essaie de me piquer mon iPhone en
protestant. Je l'engueule. Il m'avait offert un verre, je ne pouvais
pas l'envoyer chier mais je commençais à m'énerver. « Ah !
Je te présente mon frère et mon beau-frère, Abdel. »
Me dit-il. Je serre les mains. Abdel ? Son beau-frère ? Au
mari de ma copine de Loudéac. Louche... J'essaie d'en savoir plus.
« Au fait, vous habitez toujours dans le
coin de Vannes ? » « Oui,
on est chez mes parents pour le week-end. » Ah !
Dans le temps, ils allaient chez ses parents à elle. « Au
fait, Gilles, il n'est pas là Gilles ? » « Heu...
Tu m'as déjà demandé. » « Ah
heu désolé, heu... Nico, c'est bien ça, c'est bien Nico ? »
« Oui ». Je me suis alors
tourné vers le comptoir, plongeant de plus belle dans mon iPhone. Il
essaie à nouveau de me le piquer. J'avais trouvé un prétexte pour
l'envoyer chier. Qu'on ne se rappelle plus de mon prénom est une
chose mais qu'on me le demande en jouant les copains d'enfance,
c'était trop.
Il est parti à une table avec son
frère et son beau-frère.
Je suis allé aux toilettes. En
revenant, j'ai eu un mal de fou à récupérer ma place au comptoir.
Il y avait des clients sur trois rangées qui attendaient qu'on leur
serve leurs verres. Chose inhabituelle chez moi, j'ai bousculé tout
le monde, abusant de ma carrure et de mon âge. J'ai récupéré ma
place, j'ai viré la pouffe assise sur mon tabouret. J'ai fini ma
bière. J'en ai commandé une autre. J'ai compris que la serveuse
était un peu dans le même état que moi sauf qu'elle était au
travail et pas là pour passer une bonne soirée... J'ai payé, bu mon verre et je
suis parti.
Cette après-midi, en parlant avec
l'ancien patron et la serveuse, nous avons fait le même constat :
la plupart des clients n'étaient pas des habitués. Mais finalement,
en rédigeant ces lignes, je me rends que parmi les types de plus de
25 ans, j'étais le seul habitué. Aucun de ceux qui traînent
parfois par là n'était présent : la bande à Momo, les gars
de chez Leclerc,... J'avais d'ailleurs remarqué que Jean-Luc était
parti dès 21 heures ou 21 heures 30. Les quelques autres qui étaient avec lui l'ont suivi, me semble-t-il.
Comme si tout le monde avait prévu le
déroulement de la soirée, sauf moi. Sauf moi ? Maintenant, je
me rappelle que j'y suis allé à reculons. Presque par réflexe. Il
ne se passe jamais rien, le vendredi soir, à Loudéac, dans « ma
bande ». Pourtant, j'aime ces vendredis soir, toutes les trois
semaines, seul au comptoir avec mon iPhone et tous ces jeunes qui
gesticulent autour de moi.
Etrange soirée.
N.B. : la photo n'a pas été prise hier soir au 1880. Je l'ai trouvée sur Google.
N.B. : la photo n'a pas été prise hier soir au 1880. Je l'ai trouvée sur Google.
"Etrange soirée à Loudéac", ça fait un bon titre de film.
RépondreSupprimerTu viens d'en écrire le scénario, dans lequel tu te révèles assez violent ... quoi ? toi Nicolas, tu as viré la pouffe assise sur ton tabouret ? ... j'arrive pas à le croire !
J'ai 47 ans. Elle 18. Je suis resté poli. J'ai dit : j'étais là en la regardant d'un regard si noire qu'elle a du avoir peur de prendre une baffe. Je n'ai rien fait de mal, m'dame.
SupprimerJ'ai entendu parler de cette soirée avant de lire ton billet. En voyant les photos sur Facebook, je me dis que je ne serais pas resté plus d'une heure. J'aime pas quand il y a trop de monde au 18.
RépondreSupprimerLe monde ne me dérange pas si je suis seul (quand je suis avec mes potes bourrés, par contre,...). D'ailleurs, il y a une photo de moi parmi celles sur Facebook : je suis zen. Mais ce soir là, il y avait en plus quelque chose de glauque.
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