Vous connaissez sans doute le 1880 dans
les réseaux sociaux par les cuites que prennent les membres d'une
équipe de jeunes, dite « la bande à Jo »,
essentiellement le vendredi soir pendant qu'un gros frisé joue au
comptoir avec son iPhone, les regardant d'un œil bonhomme presque
affectif, en se rappelant ses propres jeunes années quand il n'était
pas encore le dernier survivant de sa propre bande.
Souvent, il y a un tas d'autres types,
encore plus jeunes mais, le 8 mai, ils étaient probablement en train
de célébrer la fin de la guerre. Seul le gros frisé et la bande à
Jo était là à laquelle il manquait un individu coincé en région
parisienne et un autre en Touraine, le fou, aux mains des sauvages
locaux (il a même été une fois de ma part à l'Epée Royale, même
le serveur se rappelait de moi alors que je n'y avais passé que deux
soirées, deux avant avant).
Seul le gros frisé n'était pas
ostensiblement bourré, les autres chantaient, dansaient et tapaient
sur le gros frisé avec sa dégaine de punching ball. A un moment,
l'un deux dix : « hé ! Jégoun ! Tu vas faire
un selfie – hips – et nous mettre sur Twitter ». J'ai fait
le selfie et l'ai mis sur Facebook (Twitter est vide la nuit).
A la fermeture, le patron a essayé de
virer tout le monde. Il faut s'y prendre un quart d'heure à
l'avance. Un lascar a déclaré : « hips, je passe payé
demain dès l'ouverture, ah non, dix minutes après, ça m'évitera
d'aider ta mère à sortir la terrasse ». Ils sont tous partis,
progressivement, renversant leurs boissons en cours dans des gobelets
en plastiques.
Tout était plus ou moins calme. Il
restait deux ou trois ivrognes. Clem dit au gros frisé : « Heu,
hips, faut que j'aille prendre une cuite dans ton bistro, la Comète,
à Paris, on rigole bien avec les conneries que tu mets dans
Facebook. » « Ben heu, c'est un bistro comme un autre
mais il ferme tôt, mais si tu veux lire mes conneries va voir mon
blog. » « J'ai pas l'adresse ».T'inquiète pas.
« Et puis, ça fait loin pour prendre une cuite. » « Mais
non, Quentin, le frère à Florent habite là-bas, tu connais
Florent ? » « Oui, je connais Florent, je connais
Quentin, je vous connaît tous. »
D'ailleurs, Florent est arrivé après :
« heu, hips aussi, Nicolas, ça fait longtemps qu'on se connaît
mais on n'a jamais trop discuté. » « bah non ».
Alors le gros frisé a payé est parti.
Le reste de la bande était égaillé. Certains vidaient leurs
gobelets. Les gendarmes sont passés devant en camionnettes. Le
visage du conducteur était visible. Il a jeté un œil, souri, l'air
de penser « tout va bien, le calme règne, le bistro ferme à
l'heure ». Ils ont poursuivi leur chemin et le gros frisé est
rentré. Il restait 2% de batterie à son iPhone.
Le samedi soir, le gros frisé est
moins souvent seul au comptoir. Il est avec un autre gros plus saoul
que lui car il a commencé plus tôt, très bavard, et un autre,
moins gros, et sourd, ce qui expliquent probablement qu'ils se
supportent. Parfois, les survivants de la bande à Jo sont là. Et il
y a Moy au comptoir qui commence la soirée en essayant d'emballer
des blondes et finit par parler politique avec des inconnus. Il y a
Jean-Marie aussi, presque systématiquement, et souvent quelques
gugusses, certains encore plus vieux que le gros frisés.
Samedi 9 mai, c'était assez calme. Moy
avait trouvé des anglais et le gros frisé avait un peu plus soif
qu'en moyenne. La chaleur probablement.
Le dimanche matin, c'est différent. Le
gros frisé est arrivé, ce matin. Il a pris une photo du parking. Il
y a toujours la voiture de Moy, à se demander s'il la bouge,
parfois. Ce matin, il y avait une mobylette à côté, occupant une
place de voiture. Probablement un type qui avait perdu son permis
après avoir « soufflé dedans » mais qui estime qu'il a
toujours droit à une place de parking.
Le bistro aura récupéré sa vocation
première : le PMU. Des gens font la queue pour dépenser leur
argent. Ils se regroupent autour des journaux, échanger des
pronostics, comme si c'était le truc le plus important du monde. Le
gros frisé se met au comptoir et prend un café. Il plonge dans son
iPhone mais n'a pas la tête à ça. Il regarde autour de lui et a
une réflexion étrange : il fuit les PMU, le dimanche matin, en
région Parisienne, pour les mêmes raisons qu'il y va le dimanche
matin, à Loudéac. Va comprendre.
Le dimanche soir, c'est autre chose.
Les survivants du week-end passent, les
jeunes, les joueurs,... Certains ont assisté aux courses organisées
dans la commune plusieurs fois par an, d'autres à d'autres
événements, notamment des matchs de foot de l'équipe locale.
Ils ont passé plus de temps à la
buvette qu'à regarder ce qu'il y avait à regarder, généralement.
Alors le gros frisé s'amuse. Il se dit
qu'il les connaissait déjà quand les loustics de la bande à Jo
n'étaient pas encore nés.
Ègayé !
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SupprimerCorrigé... Merci.
SupprimerCa ne me dit pas la forme des verres
RépondreSupprimerIls étaient en forme.
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