Pages

02 octobre 2024

Mon coloc



 

Déjà, le gars, il ne ferme pas la porte des toilettes quand il va pisser et il le fait au milieu de la cuvette comme s’il voulait que j’entende bien qu’il ne fait pas à côté. Il tire la chasse en entrant et en sortant. Il est bruyant. Quand je fais la sieste, juste après déjeuner, je l’entends mastiquer. Et toute la soirée, il tousse, se mouche, renifle, déglutit bruyamment et va jusqu’à lancer quelques pets. La nuit, il se réveille et va faire des gargarismes dans la salle de bain pour se décoincer la gorge.

C’est mon nouveau colocataire, celui qui partage ma chambre depuis que j’ai changé de service et suis en « hôpital de semaine ».

Son téléviseur fonctionne jusqu’après 23h30, sans le son vu qu’il y a des écouteurs, mais les changements de luminosité suffisent pour me perturber et m’empêcher, même pas de dormir, mais de rentrer dans cette phase où l’on se laisse aller en attendant que Morphée bouge ses fesses (et surtout ses bras).

Une grande partie de la journée, il piétine. Je ne sais pas ce qu’il fout. Par exemple, quand il va se laver les dents, il va une première fois ouvrir la porte de la salle de bain, va chercher sa brosse à dent, retourne prendre sa serviette, revient, ferme, se les lave, ressort, retourne prendre son matériel (pour ma part, je fais tout ça en un seul voyage).

Sur la photo, vous voyez une zone de la chambre avec son fourbi. Le mien tient dans mon armoire. Il ne se rend pas compte que la vue est dérangeante. Rien de bien grave mais, déjà qu’on est à l’hôpital, on a l’impression qu’on en a pris un du tiers monde, comme si on était à Calcutta… Quand on est arrivé, j’ai commencé par ranger mes affaires : tout dans l’armoire sauf la brosse à dent et le dentifrice, sur la tablette de la salle de bain et la serviette de douche, dans le machin ad hoc. Il m’a fait comprendre que la salle de bain devait rester un territoire neutre et qu’on ne devait rien y laisser. Dont acte.

 

Le premier matin, il m’a fait comprendre que je l’avais réveillé en reposant mon verre d’eau sur la tablette (c’est vrai que cela fait du bruit) mais il ne s’est pas rendu compte qu’il m’avait gêné au moment de m’endormir puis réveillé plusieurs fois dans la nuit. Je suis resté calme.

Ses défauts pourraient s’arrêter là mais, en plus, il est horriblement bavard, par moment. Il ne parle pas très souvent (nous avons deux ou trois vraies conversations par jour) mais il ne sait pas s’arrêter, même quand, visiblement, je ne suis pas intéressé. Ce matin, par exemple (pour vous montrer que je ne suis pas « le seul » caractériel), c’est le toubib qui s’est un peu énervé quand le gars racontait ses malheurs. Le doc lui a dit, à peu près : « mais je sais tout ça, vous me l’avez raconté hier et avant-hier et, en plus, mon boulot est essentiellement d’étudier vos dossiers pour garantir le bon déroulement des soins ».

Il me parle un peu de son métier (il travaille dans l’immobilier où il a pris la suite se son père). Je lui ai dit le mien (mais je défis quiconque de deviner précisément ce que je fais, j’estime que ça n’intéresse que ma hiérarchie et les proches collègues, je ne vois pas l’intérêt d’en dire plus à des gens qui ne sont pas capables de comprendre, non pas par bêtise mais à cause de la spécificité). Il a compris que j’étais informaticien (il n’a pas totalement tort) et m’a dit qu’il l’avait été avant la retraite de son père…

J’ai eu droit à des heures d’explications sur ce qu’il faisait (surveiller des salles d’ordinateur et appeler des spécialistes en cas de problème).

Au cours d’une discussion, il m’a dit qu’il n’aimait pas les smartphones parce que ces machins ne font que ce qu’ils veulent. Il a gardé un vieux téléphone à clapet et trouve que c’est bien plus tendance compte tenu du fait qu’ils ont les mêmes dans Star Trek, même que Univesal, les producteurs, touchent des dividendes sur la vente de ces machins (c’est probablement faux mais les rumeurs ont la vie dure).

Il a surtout réussi à me faire comprendre que tous les utilisateurs de ces machins étaient probablement des parfaits abrutis (merci pour moi qui y passe plus de 10 heures par jour, à l’hôpital, pour lire, bloguer…).

Il n’arrête pas de donner des conseils. Vous devriez marcher. Vous devriez ne plus manger de sel ou de sucre. Vous devriez demander des écouteurs pour la télé. J’en passe. Tant pis si je marche (j’ai un peu que ça à faire et je reviens de loin), si je fais déjà attention à ce que je mange (au niveau sel et sucre, pas du gras…), si je ne regarde pas la télé.

 

A part ça, la santé va bien. J’ai encore perdu du poids (1,2 kg de puis la dernière pesée, de mémoire). Les séances de vélo « d’appartement » sont pénibles (les selles font mal au cul et elles sont très longues). La gymnastique et la musculation ont tendance à m’amuser ; disons que c’est une bonne distraction même si je serais mieux au bistro.

Que je vais revoir après-demain !

 

Evidemment, mon colocataire connait mieux la bière et la charcuterie que moi. Il connait mieux la médecine que les docteurs. Dès le premier jour, il m’a expliqué qu’il ne fallait pas regarder le compteur de vitesse du vélo mais uniquement le voyant avec le rythme cardiaque, pour ne pas le faire trop monter.

J’ai renoncé à lui expliquer que le but de nos pédalages est de faire travailler le palpitant.

6 commentaires:

  1. À part étouffer ce connard sous son oreiller durant son sommeil, je ne vois pas ce que vous pouvez faire. Malheureusement, c'est une solution qui est toujours susceptible d'entraîner des suites judiciaro-policières pénibles...

    DG

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je n'aime pas tuer les gens. Alors je vais seulement espérer que nous ne serons plus ensemble la semaine prochaine.

      Supprimer
  2. C'est pas le prince de Galles

    RépondreSupprimer
  3. tu est tombe sur un je-sais-tout, la pire espèce. Dommage que je n'ai plus mon livre sur les poisons, je te l'aurai prété.

    RépondreSupprimer

La modération des commentaires est activée. Soyez patients !